Rentrée littéraire : et si on négociait son contrat d’édition ?
Vous avez envoyé un manuscrit à plusieurs maisons d’édition et la réponse tant attendue est arrivée : on va éditer votre livre !
Un contrat d’édition va ensuite vous être soumis pour signature.
Avant de vous engager, avez-vous pris le temps de le relire et de vérifier que vos intérêts sont respectés ? Et si tel n’est pas le cas avez-vous essayé de négocier certaines clauses ?
Focus sur les points essentiels à analyser avant de signer avec un éditeur.
Un contrat d’édition est défini par la loi comme un « contrat par lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de l’œuvre ou de la réaliser ou faire réaliser sous une forme numérique, à charge pour elle d’en assurer la publication et la diffusion »[1].
Par ce contrat, vous confiez donc la fabrication et la publication de votre ouvrage à un éditeur qui seul supporte les risques financiers liés à l’édition.
Le contrat d’édition se distingue ainsi du contrat à compte d’auteur par lequel « l’auteur ou ses ayants droit versent à l’éditeur une rémunération convenue, à charge par ce dernier de fabriquer en nombre, dans la forme et suivant les modes d’expression déterminés au contrat, des exemplaires de l’œuvre ou de la réaliser ou faire réaliser sous une forme numérique et d’en assurer la publication et la diffusion. Ce contrat constitue un louage d’ouvrage (…) »[2].
Le contrat d’édition, même s’il s’agit d’un contrat type proposé par une maison d’édition, est par ailleurs très encadré par loi : il doit être écrit et certaines clauses qu’il contient sont obligatoires.
Si votre premier réflexe doit donc être de vérifier que l’éditeur a bien respecté ses obligations légales, votre attention doit également se porter sur les clauses suivantes :
- La cession des droits d’auteurs: cette clause sera généralement très large au profit de l’éditeur qui va par exemple prévoir une cession de vos droits pour le monde entier et pour une durée excessive pouvant atteindre la durée légale des droits d’auteur (à savoir la vie de l’auteur et 70 ans après sa mort). Si tel est le cas, il faut avoir conscience des engagements que cela entraîne et ne pas hésiter à la négocier !
Les formes d’exploitation de votre œuvre doivent aussi être négociées si vous souhaitez vous en réserver certaines. Et la cession des droits pour une adaptation audiovisuelle peut toujours être refusée. Si vous l’acceptez, elle devra faire l’objet d’un contrat distinct. - La rémunération de l’auteur : elle correspond traditionnellement à un pourcentage, souvent sous forme de palier, de la vente et/ou de l’exploitation de l’oeuvre et doit se baser sur le prix de vente au public hors taxes qui est déterminé par l’éditeur. Cette mention de « prix de vente au public hors taxes» devra être indiquée et préalablement communiquée à l’auteur. La rémunération peut toujours être négociée à la hausse ! Cette clause peut également prévoir une avance sur droits qui pourra aussi être négociée.
- Le droit de préférence: dans la mesure où il s’agit d’un engagement important de votre part de faire éditer vos prochaines œuvres chez l’éditeur, ce droit est soumis à des conditions très strictes[3]. Il conviendra notamment de vérifier que ce droit porte i) sur des œuvres d’un ou plusieurs genres déterminés et mentionnés dans le contrat, et ii) pour chaque genre, à cinq œuvres nouvelles maximum à compter de la signature du contrat d’édition relatif à la première œuvre.
- Les obligations de l’éditeur : Prévues par la loi, il s’agit notamment de publier, imprimer et diffuser à ses frais l’oeuvre[4]. Il est conseillé de vérifier qu’un délai de publication soit prévu dans le contrat.
- Les attributions de l’éditeur: Cette clause doit être relue avec attention et négociée si elle ne vous convient pas puisqu’elle peut prévoir des droits importants au profit de l’éditeur, comme celui de choisir le titre de l’oeuvre, voir de le déposer en tant que marque.
De nombreuses autres clauses doivent être relues avec attention et négociées si besoin : la résiliation du contrat d’édition, la clause de responsabilité, les droits de propriété intellectuelle des produits dérivés de merchandising, l’exploitation de l’oeuvre sous forme numérique, les obligations en matière de correction…
Ce travail de relecture et de négociation peut paraître fastidieux et malvenu en début de relation avec un éditeur pour l’édition d’un premier livre.
Il est pourtant nécessaire afin que vous vous engagiez en toute connaissance de cause et que vous ne soyez pas surpris ni contrarié sur l’application de ce contrat dans le futur !
Vous souhaitez être accompagné pour relire votre contrat d’édition afin de bien comprendre vos droits et vos obligations ? Vous souhaitez négocier certaines clauses avec l’aide d’un conseil spécialisé en droit d’auteur ?
Nos avocats sont à votre disposition pour s’assurer que ce dernier respecte vos droits et vos intérêts et pour vous assister dans toute négociation que vous souhaitez entreprendre.
[1] Article L.132-1 du Code de la propriété intellectuelle
[2] Article L.132-2 du Code de la propriété intellectuelle
[3] Article L. 132-4 du Code de la propriété intellectuelle
[4] Article L.132-1 du Code de la propriété intellectuelle